Le Sahel central, «l’un des plus gros trous noirs de l’information»

Le Sahel central, «l’un des plus gros trous noirs de l’information»

Chaque année, la Journée mondiale des droits de la presse est célébrée. Crise environnementale et urgence du journalisme, c’est la thématique de cette année. Au Sahel central, les conditions de travail des journalistes se sont détériorées, selon plusieurs rapports d’organisations internationales. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger sont d’ailleurs perçus comme des déserts de l’information depuis que ces trois pays ont à leur tête des régimes militaires.

En l’espace de trois ans, plus d’une dizaine de médias internationaux et locaux ont été temporairement ou totalement suspendus au Mali, au Burkina Faso et au Niger, dont RFI et France 24. L’expulsion et la non-délivrance de visas ou d’accréditation à des journalistes étrangers, mais surtout français, a marqué la volonté de ces régimes de s’affranchir d’une presse pluraliste jugée non conforme à leurs principes.

En plus des pressions et des entraves des autorités, les journalistes y subissent le joug des terroristes. « L’intensification des attaques des groupes armés n’a cessé de réduire l’espace de collecte de l’information des journalistes et d’affaiblir les moyens de diffusion », selon un rapport de l’organisation Reporters Sans Frontières, paru l’an dernier. De nombreuses radios communautaires ont été détruites ou fermées face à la pression terroriste. Plus grave encore, cinq journalistes ont été assassinés dans la région et une demi-douzaine ont été portés disparus depuis 2013.

Pour RSF, « le Sahel est devenu l’un des plus gros trous noirs de l’information ». L’espace de liberté de la presse s’est considérablement réduit face aux pressions, aux arrestations ou, comme au Burkina Faso, aux réquisitions forcées aux côtés de l’armée.

Journalistes en exil
C’est donc depuis l’étranger qu’une partie de la couverture de ces trois pays s’opèrent. D’abord par des journalistes de ces pays aujourd’hui en exil comme Malick Konaté ou Ahmed Barry qui continuent de produire sur l’actualité de leurs pays. Ensuite, grâce à de nombreuses sources sur place qui permettent aux journalistes de savoir ce qu’il se passe dans ces pays. Toutefois, il est toujours plus difficile, sans accès au terrain, de recouper certaines informations.

Ainsi, pour véhiculer une information libre, fiable et plurielle, les médias locaux doivent s’organiser. Pour les sujets sensibles, c’est aujourd’hui très compliqué. Sur les questions sécuritaires par exemple, il existe une véritable omerta. L’approche dans le traitement de l’information est surtout factuel avec une reprise dans les médias des communiqués officiels des autorités. Les témoignages sont rares et souvent anonymisés pour éviter tous risques aux sources et lanceurs d’alerte.

Autocensure
Du fait d’une surveillance accrue, les enquêtes sur les armées et leurs supplétifs ainsi que sur les conflits sont généralement évités par les confrères travaillant au Sahel central. Au Niger, Idrissa Soumana Maiga directeur du journal L’enquêteur a d’ailleurs été interpellé jeudi 25 avril. Il a depuis été placé sous mandat de dépôt et écrouée pour « atteinte à la défense nationale ». Il risque entre cinq à dix ans de réclusion après la publication d’une information reprise du journal Le Figaro faisant état d’« installation présumée de matériel d’écoute par des agents russes sur les bâtiments officiels nigériens ».


Garé Amadou, défenseur des droits humains et directeur de publication du Canard déchainé, lui a rendu visite en prison ce mercredi. Au quotidien, il prend des précautions pour éviter tout risque de détention. « C’est sûr qu’il est difficile de travailler comme quand on est en période démocratique, il est difficile de faire comme ci de rien n’était. Ill y a une certaine autocensure et il y a certains sujets que certains évitent de développer dans leurs médias de crainte de n’être pris pour cible par la junte parce que quoi qu’on dise, un régime militaire n’est pas un régime démocratique. Mais certains essaient tant bien que mal de faire leur boulot ! Il y a vraiment des journalistes extrêmement courageux qui continuent malgré les risques encourus », explique-t-il.

rfi.fr

Petit Ba

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