Confidence d’un pêcheur devenu ramasseur de corps en mer : « Je ne parviens plus à dénombrer les cadavres que j’enterre »

Confidence d’un pêcheur devenu ramasseur de corps en mer : « Je ne parviens plus à dénombrer les cadavres que j’enterre »

Il a fait plus de 25 ans dans les opérations de sauvetage en mer. Pa Lamine Fall est pêcheur, mais par la force des choses, le sauvetage des candidats à l’émigration irrégulière est devenu une seconde activité pour lui. Il y a juste 2 mois, il a procédé à l’inhumation de deux (2) corps qui ont échoué sur la plage.

« Je ne parviens même plus à dénombrer les cadavres que j’enterre durant l’année. Beaucoup sont des candidats à l’émigration irrégulière. Ces derniers ne savent pas nager. Donc, si la pirogue dans laquelle ils voyageaient chavire, forcément le nombre de morts est important», témoigne-t-il dans le journal L’Observateur. repris par le site pressafrik.

Adultes ou enfants, la mort semble ne plus être une hantise pour les populations. Chez Pape Lamine Fall, sa progéniture côtoie souvent les corps qui échouent sur la plage. « Mon garçon qui est âgé de moins de 10 ans m’aide parfois à recueillir les corps. Ils ont cette habitude de côtoyer les corps qui échouent sur la plage ou qui flottent en mer. Quand on me signale un corps qui se trouve en mer, je prends ma pirogue pour la récupérer. S’il n’est pas en état de décomposition, je le mets dans la pirogue, mais s’il est en état de putréfaction avancé, j’attache ses pieds ensuite je noue la corde à la pi- rogue pour le traîner jusqu’à la plage. Les morts ne parlent et ne ressentent pas la douleur. C’est le seul moyen que je trouve pour les acheminer sur la berge pour ensuite les enterrer. Les jeunes que j’ai eu à enterrer ici sont âgés entre 18 à 20 ans. Les plus âgés ont 25 ans. Parmi les corps repêchés, un seul a été identifié. Il a été remis à ses parents pour être enterré à Touba. Le visage des morts est très périssable. Il suffit de passer un jour dans l’eau pour que le visage soit dé- figuré. Beaucoup de corps sont encore dans l’eau. Il faut au moins une semaine pour qu’ils puissent surnager. C’est lorsque le corps est en état de décomposition qu’il flotte», fait savoir Pa Lamine Fall.

« Il m’arrive de sauver un jeune qui me dit que c’est la 4e fois que vous venez à mon secours »

La plupart des candidats à l’émigration irrégulière passent par sur axe avant de tenter une entrée en Europe. «On essaye à chaque fois de sensibiliser les jeunes pour qu’ils renoncent à l’émigration irrégulière. A cause de la conjoncture économique assez dure, il est très difficile de retenir les jeunes. Ici à Gandiol, beaucoup de jeunes prennent la mer pour aller en Europe. Et beaucoup d’entre eux disparaissent en mer », se désole Insa Wade, coordonnateur du conseil local de pêche artisanale (Clpa).

« Je pense qu’il sera très difficile de venir à bout de l’émigration irrégulière. La tentation est réelle et forte. Il m’arrive de sauver un jeune qui me dit que c’est la quatrième fois que vous venez à mon secours», soutient Pa Lamine.

Amadeus

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