Jeune Afrique « proteste » contre sa suspension au Burkina Faso

Jeune Afrique « proteste » contre sa suspension au Burkina Faso

Le média français Jeune Afrique (journal papier, site internet) a « protesté » mardi contre la suspension de sa diffusion au Burkina Faso annoncée la veille par le gouvernement de ce pays, après la parution d’articles évoquant des tensions au sein de l’armée burkinabè.

Depuis un an, le régime burkinabè, dirigé par des militaires après deux coups d’Etat en 2022, a suspendu temporairement ou sine die la diffusion de plusieurs chaînes de télévision ou radio et expulsé des correspondants étrangers, de médias français notamment.

Cette suspension « est une atteinte de plus à la liberté d’information dans un pays, celui de Norbert Zongo », a écrit Jeune Afrique dans un communiqué, en référence au journaliste burkinabè assassiné en 1998.

Le média dénonce également « une censure d’un autre âge, tout en souhaitant que ses auteurs puissent la reconsidérer », affirmant qu’elle « contribue un peu plus à faire de la région et du Burkina Faso en particulier, une zone de non-information ».

Lundi soir, le gouvernement de transition du Burkina Faso, avait annoncé « la suspension jusqu’à nouvel ordre de tous les supports de diffusion de Jeune Afrique au Burkina Faso à compter de ce lundi 25 septembre ».

Dans un communiqué, les autorités justifient leur décision par la diffusion d' »un nouvel article mensonger sur le site du journal Jeune Afrique, intitulé: +Au Burkina Faso, toujours des tensions au sein de l’armée+ ».

« Cette publication fait suite à un article précédent dudit journal sur le même site », publié jeudi, « dans lequel Jeune Afrique alléguait qu’+Au Burkina Faso, la grogne monte dans les casernes+ », ajoute le texte, signé du ministre de la Communication Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo.

Selon le gouvernement, « ces affirmations faites à dessein sans l’ombre d’un début de preuve n’ont pour seul but que de jeter un discrédit inacceptable sur les Forces armées nationales et par-delà l’ensemble des forces combattantes ».

Parmi les personnes interrogées par l’AFP à Ouagadougou, certaines avaient toujours accès au site internet, quand d’autres ont indiqué avoir rencontré des difficultés à s’y connecter.

Fondé en 1960, Jeune Afrique est un média panafricain francophone basé en France, et qui compte plusieurs correspondants et collaborateurs en Afrique et ailleurs. Il est composé d’un site internet d’informations et d’une version papier publiée mensuellement.

  • Plusieurs médias suspendus –

La décision des autorités burkinabè intervient près d’un an après l’arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré par un coup d’Etat, le deuxième en huit mois.

Le Burkina Faso partage plusieurs de ses frontières avec deux pays également dirigés par des militaires, arrivés au pouvoir par des coups de force: le Mali depuis 2020 et le Niger depuis fin juillet.

En juin, les autorités burkinabè avaient annoncé la suspension de la chaîne française LCI pendant trois mois, après avoir expulsé les correspondantes des quotidiens français Libération et Le Monde en avril.

Fin mars, elles avaient ordonné la suspension sine die de la chaîne de télévision France 24, après avoir suspendu en décembre 2022 Radio France Internationale (RFI), médias publics français accusés d’avoir relayé des messages de chefs jihadistes.

Depuis 2015, le pays fait face à des violences jihadistes récurrentes, qui ont fait en tout plus de 17.000 morts et plus de deux millions de déplacés internes.

Le Burkina avait également suspendu pendant un mois, entre août et septembre, la radio nationale la plus écoutée du pays, Radio Oméga, accusée d’avoir interviewé un opposant au régime militaire du Niger, confronté lui aussi à des attaques jihadistes récurrentes.

« Le gouvernement restera intraitable avec tout acteur médiatique qui mettra sa plume au service d’intérêts étrangers à ceux du peuple burkinabè », rappelle le communiqué.

Le Sahel, région qui traverse le continent africain d’ouest en est et dont fait partie le Burkina, risque de devenir « la plus grande zone de non-information de l’Afrique », déplorait un rapport de Reporters sans frontières en avril.

Amouradis

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