« Actes de génocide » : L’Afrique du Sud enfonce Israël devant la justice internationale

« Actes de génocide » : L’Afrique du Sud enfonce Israël devant la justice internationale

Alors que la guerre à Gaza en est à son 83e jour et a fait plus de 21 000 morts, l’Afrique du Sud lance une nouvelle procédure contre Israël : Pretoria a lancé une requête auprès de la Cour internationale de Justice (CIJ), l’organe de l’ONU qui juge les différends entre États, pour dénoncer ce qu’elle estime être le caractère « génocidaire » de l’invasion israélienne à Gaza. Depuis le début du conflit, la nation arc-en-ciel est en tête de file des critiques ouverts d’Israël, et avait émis une première requête auprès de la Cour pénale internationale.

Dans sa requête à la Cour internationale de justice (CIJ), l’Afrique du Sud affirme qu’Israël « s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien à Gaza ». Elle dénonce des « massacres » et une intention de « détruire » ce peuple, rapporte notre correspondante à Johannesburg, Joséphine Kloeckner.

Des mots forts que la nation arc-en-ciel n’emploie pas pour la première fois : il y a un mois, le gouvernement avait déjà accusé Israël de crimes de guerre et de génocide à Gaza, rappelé tous ses diplomates de Tel-Aviv, et demandé avec quatre autres pays le lancement d’une enquête par la Cour pénale internationale (CPI). Israël avait rétorqué en annonçant à son tour le rappel de son ambassadeur en Afrique du Sud.

Le soutien de l’Afrique du Sud à la cause palestinienne ne date pas de cette guerre qui fait rage depuis bientôt trois mois : il est dans l’ADN de la politique internationale de l’ANC, le parti de la libération au pouvoir depuis 30 ans, qui la compare souvent à son propre combat contre l’apartheid.

Dans un communiqué, le gouvernement explique continuer à appeler à « un cessez-le-feu immédiat et permanent, et à la reprise des pourparlers, pour mettre fin », selon ses mots, « à la violence résultant de l’occupation belligérante de la Palestine ».

Les « actes et omissions d’Israël revêtent un caractère génocidaire »
Dans sa plainte de 84 pages, Pretoria affirme que les « actes et omissions d’Israël revêtent un caractère génocidaire, car ils s’accompagnent de l’intention spécifique requise […] de détruire les Palestiniens de Gaza en tant que partie du groupe national, racial et ethnique plus large des Palestiniens », a souligné dans un communiqué la CIJ, basée à La Haye, annonçant la soumission d’une requête par Pretoria.

Ces « actes et omissions » incluent « le meurtre de Palestiniens à Gaza, leur causant de graves dommages physiques et mentaux et leur infligeant des conditions de vie susceptibles d’entraîner leur destruction physique », selon l’Afrique du Sud. « Ces actes sont tous imputables à Israël, qui n’a pas réussi à empêcher le génocide et commet un génocide en violation manifeste de la Convention sur le génocide », a-t-elle poursuivi. « L’État israélien, y compris aux plus hauts niveaux, du président, du Premier ministre et du ministre de la Défense israéliens expriment une intention génocidaire », indique-t-elle également.

Israël rejette les accusations « avec dégoût »
Ces accusations ont été aussitôt balayées « avec dégoût » par le gouvernement de Benjamin Netanyahu. « Israël rejette avec dégoût la diffamation […] propagée par l’Afrique du Sud et son recours à la Cour internationale de justice », a réagi sur le réseau social X (anciennement appelé Twitter) le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Lior Haiat.

Depuis près de cinq ans, Pretoria n’a plus d’ambassade à Tel Aviv, mais un simple bureau de liaison, ayant toujours eu des liens tendus avec l’État hébreu. Une position confirmée en mars, bien avant le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

La CPI avait déjà ouvert en 2021 une enquête sur des crimes de guerre présumés dans les Territoires palestiniens, notamment sur des crimes présumés commis par les forces israéliennes, le Hamas et les autres groupes armés palestiniens.

Dans sa position l’Afrique du Sud condamne l’attaque du 7 octobre commise par le Hamas dans le sud d’Israël, et qui a fait près de 1 200 morts, mais ajoute que rien ne peut justifier des actes génocidaires, rapporte notre correspondante à la Haye, Stéphanie Maupas.

Dans la requête de l’Afrique du Sud devant la CIJ, l’« intention » peut-être « déduite […] de la nature et de la conduite de l’opération militaire israélienne à Gaza, eu égard notamment au fait qu’Israël n’a pas fourni ou assuré des vivres, de l’eau, des médicaments, du carburant, des abris et d’autres aides humanitaires essentiels aux personnes assiégées et bloquées du peuple palestinien, ce qui l’a poussé au bord de la famine ».

L’Afrique du Sud a précisé dans sa requête s’être tournée vers la cour pour « établir la responsabilité d’Israël pour les violations de la convention sur le génocide », mais également pour « assurer la protection urgente et la plus complète possible aux Palestiniens ».

La procédure prendra probablement plusieurs années. Mais Pretoria demande de ce fait à la cour de prononcer des mesures urgentes pour « protéger le peuple palestinien à Gaza », en enjoignant notamment à Israël de « mettre immédiatement fin à toutes les attaques militaires ». L’Afrique du Sud demande également à Israël de renoncer aux transferts forcés de population à l’intérieur de la bande de Gaza, ou de laisser passer l’aide humanitaire. Réponse des juges dans les prochaines semaines.

Amadeus

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