L’accord migratoire très contesté entre le Royaume-Uni et le Rwanda
Le Parlement britannique a donc adopté, dans la nuit de lundi à mardi, la loi permettant d’envoyer les demandeurs d’asile arrivant sur le sol britannique vers le Rwanda. Une loi pour le moins controversée…
En effet, les réactions indignées sont légion ce matin dans la presse.
Dans une tribune publiée par le Guardian à Londres, Enver Solomon, directeur général du Conseil pour les Réfugiés, affirme que cette loi est « à la fois absurde et inhumaine. Elle n’arrêtera ni les bateaux ni les passeurs, et elle ne sauvera pas de vies. Les députés britanniques ont adopté un projet de loi qui entraînera davantage de morts et de souffrances. (…) Les réfugiés doivent être traités avec dignité, respect et humanité : leurs demandes d’asile doivent être examinées équitablement et en temps opportun sur le sol britannique. Il s’agit d’une fonction essentielle que le Royaume-Uni doit remplir en tant que signataire fondateur de la convention des Nations Unies sur les réfugiés de 1951. »
Inhumanité…
Libération à Paris hausse encore le ton : « le Rwanda est désormais un pays “sûr“ selon la loi en vigueur au Royaume-Uni, qui pourra d’ici à quelques semaines envoyer dans ce pays d’Afrique des demandeurs d’asile arrivés illégalement, y compris des Afghans ayant collaboré avec l’armée britannique. C’est dire le degré d’inhumanité atteint par certains Etats quand ils se sentent pris d’assaut par des femmes et des hommes cherchant à fuir la misère et la guerre. C’est dire, surtout, s’exclame encore Libération, le gouffre dans lequel s’enfonce le parti conservateur qui non seulement a menti aux Britanniques pour mieux leur faire approuver un Brexit qu’ils sont nombreux à regretter aujourd’hui, mais qui continue à s’acharner à transformer le Royaume-Uni en forteresse pour mieux régner sur ce qui lui reste de puissance. »
Lignes rouges…
« La grande hypocrisie européenne », dénonce La Croix, toujours à Paris. « En créant la possibilité d’une expulsion des migrants illégaux vers le Rwanda, la Grande-Bretagne ne fait que pousser à l’extrême une tendance des pays européens à faire traiter la gestion des migrants par des pays tiers : Turquie, Tunisie ou Albanie… Même le pacte migratoire européen prévoit un traitement hors des frontières. (…) La réponse n’est pas seulement morale mais doit être politique, affirme encore La Croix. Il faut désigner les lignes rouges du droit à ne pas franchir, plutôt que de trahir nos principes, comme le Royaume-Uni et, donc, derrière d’autres pays européens. Sinon, on risque de tomber dans ce que Hannah Arendt appelait “les lois du mouvement“, que l’on change au gré des besoins : la voie ouverte au totalitarisme. »
Feu vert du Sénat américain pour l’aide à l’Ukraine
A la Une également, l’approbation par le Sénat américain de la nouvelle tranche d’aide à l’Ukraine…
Le New York Times se dit à la fois « soulagé, honteux, en colère et inquiet de ce qui s’est passé. (…) Soulagé qu’une nation assiégée reçoive probablement de l’aide à temps pour survivre, au moins pendant un certain temps, ce qui était de plus en plus incertain compte tenu de la supériorité écrasante de l’artillerie russe. (…) Honteux, poursuit le quotidien américain, que les choses en soient arrivées là, que l’Amérique ait été si près de trahir une démocratie en danger. (…) En colère contre la faction politique qui a bloqué l’aide pendant tant de mois, non pas, pour des raisons financières, mais probablement parce qu’elle souhaite la victoire de Vladimir Poutine. Et inquiet, pointe encore le New York Times, parce que cette faction reste puissante – une majorité de républicains à la Chambre des représentants a voté contre l’aide à l’Ukraine – et pourrait encore condamner l’Ukraine dans les années à venir. »
En tout cas, cette aide à l’Ukraine constitue « une avancée psychologique pour Kiev et un revers pour Moscou », pointe le Washington Post. « Les missiles à moyenne portée ATACM-300 nouvellement arrivés sont susceptibles de changer la donne dans ce conflit, affirme le quotidien américain. Ces armes de précision permettront à l’Ukraine de frapper en profondeur les territoires occupés par la Russie. »
De l’inefficacité des sanctions économiques…
Enfin, à lire dans Le Temps à Genève, ce point de vue sur « l’inefficacité des sanctions économiques » envers la Russie. « Ce type de représailles, destiné à affaiblir économiquement un pays pour le faire plier, a révélé toutes ses limites. Parce que des régimes autoritaires, tels ceux de Vladimir Poutine ou des mollahs iraniens, accordent peu d’importance au sort de leur population. » De plus, souligne Le Temps, « la Russie trouve aisément la parade pour écouler sa production d’or noir à bas prix en Chine ou en Inde. Dopant au passage la compétitivité de ces pays au détriment de l’industrie occidentale. (…) Les “chiquenaudes“ que représentent les sanctions économiques ne sont évidemment pas complètement indolores, affaiblissant notamment la capacité financière des personnes et des entreprises ciblées. Elles n’atteignent en revanche plus leur cible ultime, c’est-à-dire la résolution d’un conflit ou la fin d’une guerre. »
rfi.fr