Tensions au ministère des Finances : Le Directeur de Cabinet out
Depuis l’alternance politique du 24 mars 2024, le ministère des Finances et du Budget a été le théâtre d’un changement qui aura déjoué tous les pronostics. Cheikh Djiba a pris les rênes du ministère, succédant ainsi à Moustapha Ba, ancien argentier du régime précédent. Un changement qui, loin de se dérouler sans heurts, révèle des tensions internes exacerbées, notamment par le limogeage de Pape Oumar Diallo, le Directeur de Cabinet qui a officié au même poste sous Moustapha Ba remplacé par Bassirou Sarr qui a été conseiller technique du ministre sortant et de l’actuel.
Surnommé POD, Pape Oumar Diallo est étroitement lié à Ousmane Sonko et au Pastef. Son influence et ses relations étroites avec le nouveau régime révélé dernièrement ont même suscité des inquiétudes parmi les membres de l’ancien régime tant POD semblait aussi proche de Amadou Bâ.
Les dessous du limogeage de Pape Oumar Diallo
Son limogeage au poste de Directeur de Cabinet fait suite aux « révélations » sur ses activités au sein de l’agence en charge de la gestion du patrimoine bâti de l’État. En effet, l’ouverture des dossiers concernant ce que le Premier Ministre qualifie de « bradage du patrimoine bâti de l’État » a mis en lumière le rôle supposé de Pape Oumar Diallo qui entretenait une relation contractuelle avec l’agence du patrimoine bâti de l’Etat sous la direction de Abdou Karim Fofana dont il était le conseil. Mais aussi son rôle sur d’autres faits sur le foncier avec son ami Modou Gueye, Directeur des domaines, un duo de choc. Une source logée à la primature rapporte que cette situation a créé un malaise au sein du cabinet du Premier ministre, incitant certains proches d’Ousmane Sonko à réclamer son remplacement. Les réticences du ministre des Finances à l’évincer n’ont pas suffi à calmer les esprits. Il faut le rappeler Pape Oumar Diallo est un ami de longue date de Ousmane Sonko et fait partie des rédacteurs des statuts du Pastef. Il a été un relais entre le Pastef et le Macky facilitant plusieurs rencontres lors des moments de troubles politiques, notamment une audience révélée entre le député Guy Marius Sagna et le ministre Moustapha Ba. Il a été celui, d’après notre source, qui avait soufflé le nom de l’actuel ministre des Finances, Cheikh Djiba, pour mener les négociations avec Ousmane Sonko dans le cadre du « protocole du Cap Manuel », sans oublier qu’il avait été à l’origine de sa nomination à la tête de la Direction de la programmation budgétaire. Fort de cette relation de longue date avec le Premier ministre Ousmane Sonko et des liens cordiaux avec le Président Diomaye Faye, Pape Oumar Diallo avait été maintenu à son poste pour sa contribution dans la rédaction du « Projet » et sur la réforme du franc Cfa souhaité par le duo à la tête du pays. C’est donc un véritable déchirement que vit le Premier ministre qui aurait invité le ministre en charge des finances à se séparer de son DC.
Au-delà de cette situation entourant Pape Oumar Diallo, d’autres figures influentes du ministère des Finances pourraient également être touchées par des changements. Le Directeur Général de la Comptabilité Publique et du Trésor, Cheikh Tidiane Diop, serait également dans le viseur, lui qui avait été accusé d’être un pro « Sonko ». Des spéculations quant à son remplaçant circulent déjà, citant notamment le Secrétaire Général du Ministère des finances, Abdoulaye Samb, parmi les potentiels successeurs.
Les turbulences agitant le ministère des Finances mettent en lumière les défis auxquels est confronté le nouveau régime dans sa quête de transparence et de réédition des comptes. La désignation controversée de Cheikh Djiba à la tête du ministère semble ne pas être appréciée, tant au sein du Pastef que parmi les alliés, qui ne comprennent pas la nomination de ce dernier qui a été un défenseur invétéré du « PSE » sous le Macky et un des points focaux des missions de revue du FMI prônant la suppression des subventions pour aller vers une résorption du déficit.
Dans ce contexte, un cadre de l’administration des domaines soulève des interrogations sur la volonté réelle des nouvelles autorités d’ouvrir les dossiers fonciers. Il révèle des implications de certains agents du ministère des Finances, étroitement liés au duo Sonko – Diomaye, ainsi que du syndicat des agents des impôts et domaines, qui a été dirigé par l’actuel président et son Premier ministre. C’est d’ailleurs un secret de polichinelle, l’implication de personnalités réputées proches du Pastef dans les controverses entourant des dossiers fonciers brûlants, notamment celui de Mbour 4 qui a fait l’actualité ces derniers jours. Selon notre source, Mbour 4 ne serait que la partie visible de l’iceberg, révélant des scandales beaucoup plus « graves » liés aux partages du Cices, de la Cité Keur Gorgui, de la Zone de Captage, des Almadies 2, des Niayes, de Bambilor, du Lac Rose ainsi que d’autres lotissements sensibles. Le rôle du CCOD dans le cadre des consultations à domicile et le traitement de certaines attributions sont imputables aux agents de la DGID et à plusieurs fonctionnaires toujours en poste au niveau du ministère des finances. Il s’agit selon la même source d’une « mafia » qui était en place au sein du département des finances qui échappait totalement au ministre Moustapha Ba dont la plupart se sont révélés être des soutiens du Pastef.
Pour l’heure, il ressort de confidences de proches de l’ex-argentier Moustapha Ba, que ce dernier est scandalisé par le « double jeu » de plusieurs membres de son cabinet et de son administration qui soutenaient le duo Diomaye – Sonko, lui qui a été à plusieurs reprises interpellées par le Chef de l’Etat sortant sur une proximité supposée avec les opposants au régime alors qu’il n’a cessé de jouer le régulateur en misant sur les bonnes relations entretenues avec l’opposition parlementaire.
