États-Unis: le géant de la banane Chiquita jugé coupable d’avoir financé des paramilitaires colombiens
Un tribunal fédéral américain a jugé, lundi 10 juin, le géant de la banane Chiquita Brands International responsable d’avoir financé un groupe paramilitaire colombien connu pour ses exactions, une victoire historique pour les familles des victimes.
Le jury du district sud de la Floride a condamné Chiquita à verser 38,3 millions de dollars (35,5 millions d’euros) de dommages et intérêts aux membres des familles de huit personnes tuées par les milices d’Autodéfense unies de Colombie (AUC), placées par les États-Unis sur la liste des organisations terroristes. « Nos clients ont risqué leur vie pour demander des comptes à Chiquita, en s’en remettant au système judiciaire américain », a déclaré Agnieszka Fryszman, l’une des avocates des plaignants. « Le verdict ne ramènera pas les maris ni les fils qui ont été tués, mais il remet les pendules à l’heure et place la responsabilité du financement du terrorisme là où elle doit l’être : chez Chiquita », a-t-elle ajouté dans un communiqué.
En 2007, Chiquita avait plaidé coupable devant un tribunal fédéral américain d’avoir versé de l’argent aux AUC pendant six ans, arguant avoir agi ainsi pour éviter des violences contre son personnel et ses installations en Colombie.
Ce soutien « prolongé, régulier et substantiel », selon le ministère américain de la Justice, constituait un crime fédéral, s’agissant d’une organisation considérée comme terroriste par Washington. Le groupe avait accepté de payer une amende pénale de 25 millions de dollars.
Deux millions de dollars versés aux paramilitaires
Les huit plaignants du procès civil en Floride accusaient le groupe agro-alimentaire d’avoir versé près de deux millions de dollars aux AUC et de les avoir aidés à transporter des armes et de la drogue. Le jury a accepté l’argument selon lequel cet argent a été utilisé pour commettre des crimes de guerre tels que des homicides, des enlèvements, des extorsions, des tortures et des disparitions forcées.
« Ce verdict envoie un message fort aux entreprises du monde entier : celles qui profitent des violations des droits humains ne demeureront pas impunies », s’est félicité pour sa part Marco Simons, juriste chez l’organisation non-gouvernementale EarthRights International qui assiste les plaignants.
Selon cette ONG, c’est la première fois qu’un jury américain juge une grosse entreprise américaine responsable de complicité de violations des droits humains dans un autre pays. D’autres procédures civiles visant Chiquita sont en cours aux États-Unis pour les mêmes motifs, et rassemblent des centaines de plaignants.
RFI