Rapport de l’ANSD sur la configuration démographique: Ne faut-il pas brûler le dernier recensement ?
Le Sénégal a récemment dévoilé les résultats de son dernier recensement effectué par l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD). Parmi les nombreuses données, le nombre d’étrangers vivant au Sénégal, estimé à 207 791 personnes, suscite de vives interrogations et mérite une analyse approfondie.
Parmi ces chiffres, le rapport mentionne la présence de 83 830 Guinéens et 869 Cap-Verdiens sur le sol sénégalais. Ces statistiques ont rapidement été remises en question dans les discussions publiques, aussi bien dans les chaumières que dans les « grands places ».
Controverse
L’un des points les plus controversés concerne la communauté guinéenne. Lors de l’élection présidentielle de 2010 en Guinée, les inscriptions polémiques faisaient état de 23 000 électeurs guinéens au Sénégal, alors que de nombreux ressortissants se plaignaient d’ostracisme de la part des autorités consulaires les empêchant d’exercer leur droit de vote par leur inscription. Ce chiffre semble en contradiction avec celui du recensement actuel qui dénombre seulement 83 830 Guinéens. Il est également important de noter que, selon un reportage de la radio RFI diffusé en juillet 2022, la population guinéenne au Sénégal serait comprise entre deux et trois millions. Ces chiffres suggèrent une présence guinéenne bien plus importante que celle reportée par l’ANSD. En 2014, Mouhamed Yacine Diallo, président d’une association de « Sénégalais d’origine guinéenne », avait évoqué le chiffre de 3,5 millions de Guinéens vivant au Sénégal lors d’une émission télévisée. La communauté cap-verdienne au Sénégal semble également être sous-estimée. Les données de l’ANSD indiquent la présence de 869 Cap-Verdiens, un chiffre surprenant compte tenu de la forte diaspora cap-verdienne historiquement présente au Sénégal. Il est important de rappeler que le Sénégal ne reconnaît pas le droit du sol, ce qui complique davantage l’obtention de la nationalité sénégalaise pour les populations étrangères. La naturalisation est aussi complexe, impliquant de longues procédures administratives et des critères stricts. Ainsi les chiffres de l’ANSD devraient nous indiquer le nombre d’étrangers naturalisés, pour une meilleure compréhension de la véritable configuration démographique du pays, sachant que lors du recensement la question de l’ethnie et des origines avait été soulevée.
Divergences entre les chiffres officiels et les estimations populaires
Ces divergences entre les chiffres officiels et les estimations populaires posent la question de la fiabilité du recensement de l’ANSD. Les données présentées semblent loin de refléter la réalité sur le terrain, surtout pour des communautés bien établies et historiquement significatives. L’ANSD, en collaboration avec le ministère de l’Intérieur et celui de la Justice, doit apporter des éclaircissements sur le nombre de naturalisations dans le dernier recensement pour évaluer la part « d’étrangers parmi les Sénégalais ». ? Ne faut-il pas reconsidérer les méthodes utilisées pour le recensement de la population étrangère ? Ou faut-il tout simplement brûler ce dernier recensement et reprendre les travaux avec une approche plus rigoureuse et inclusive ? La question reste posée, et les réponses devront être apportées pour garantir une meilleure compréhension de la configuration démographique du Sénégal, un pays pétrolier et gazier qui ambitionne d’assurer pour ses fils et filles la couverture médicale universelle.