Bathily, Envoyé spécial du Président : Nouvel essai diplomatique…
Abdoulaye Bathily, ancien Envoyé spécial de l’Onu en Afrique centrale et médiateur au Burundi et en Lybie, qui a une longue expérience dans les questions de règlement de conflits en Afrique, devient un émissaire du Président Faye sur les questions internationales. Intraitable sur les principes démocratiques, il va dialoguer avec les putschistes du Sahel afin de les convaincre de revenir dans l’espace Cedeao.
Par Bocar SAKHO – Abdoulaye Bathily est le nouvel Envoyé spécial du Président Bassirou Diomaye Faye sur les questions internationales. Son premier ordre de mission est clair : essayer de faire revenir à la maison de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) les putschistes nigérien, malien et burkinabè, qui ont mis en place la Confédération de l’Alliance des Etats du Sahel. Les militaires au pouvoir dans ces trois pays ont quitté la Cedeao par dépit et amertume pour créer leur propre structure d’intégration. Si BDF a été désigné par ses pairs pour sauver la sainte alliance comme médiateur, Pr Bathily va devoir trouver les bons mots pour faire les faire changer d’opinion et surtout d’orientation. Mission impossible ? Sans doute pas, mais une opération au succès presque incertain.
Même s’il n’est pas diplomate au propre et au figuré, l’historien a ajouté une expérience dans ce domaine à sa riche carrière d’homme d’Etat. Envoyé spécial du Secrétaire général de l’Onu en Lybie, déchirée par un conflit sanglant depuis la chute de Kadhafi en 2011, il a dû jeter l’éponge le 16 avril 2024. Nommé en août 2022 à la tête de la Mission des Nations unies en Libye, Abdoulaye Bathily a estimé lors de l’annonce de sa démission, mardi 16 avril, qu’il ne peut «agir avec succès» pour faire aboutir le processus politique à cause des dirigeants qui placent «leurs intérêts personnels au-dessus des besoins du pays». Connu pour sa liberté de ton, il avait dénoncé «le manque de volonté politique et de bonne foi des dirigeants libyens qui sont contents de l’impasse actuelle». «C’est très triste, parce qu’en Libye aujourd’hui, l’essentiel de la population veut sortir de cette galère. Mais dans ces circonstances, il n’y a aucun moyen pour l’Onu d’agir avec succès», avait-il tonné sans mettre de gants. Sa conclusion était sans appel : il n’y avait pas «de place pour une solution politique».
Avant sa mission à Tripoli, il fut nommé le 30 avril 2014, Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu pour l’Afrique centrale. Une nomination qui intervint à cinq mois du début du déploiement de 12 mille Casques bleus en République centrafricaine plongée dans une crise politico-confessionnelle. Il avait atterri à Libreville alors qu’il était Représentant spécial adjoint du Secrétaire général de la Mission de l’Onu au Mali (Minusma). Au-delà de la crise qui couvait à Bangui, l’ancien secrétaire de la Ligue démocratique (Ld) devait apporter son expérience et expertise dans la recherche de solutions durables dans la région des Grands Lacs, notamment en accompagnant les Etats concernés à mettre en application l’accord-cadre signé en février 2013 à Addis Abeba sous l’égide des Nations unies. En juin 2015, il devint le médiateur du conflit burundais en remplacement de Saïd Djinnit, accusé de partialité en faveur du pouvoir dans la gestion du dossier. Si l’expérimenté diplomate algérien a été poussé vers la sortie par l’opposition, le Sénégalais sera récusé par le parti au pouvoir, dirigé par Pierre Nkurunziza, qui a réclamé sa démission. C’était l’impasse à Bujumbura dirigée par Nkurunziza jusqu’à sa mort.
Après cette expérience en Afrique centrale et dans les Grands lacs, l’homme politique va tenter de répondre à l’appel du continent en 2017. Panafricaniste convaincu, l’historien tente de conquérir la présidence de la Commission de l’Union africaine. Sa candidature sera portée par l’Etat du Sénégal et parrainée par les 15 pays de la Cedeao qui avaient promis de voter pour lui comme un seul homme. Finalement, son vœu ne sera pas accompli, car il sera battu par le Tchadien Moussa Faki Mahamat. L’homme politique, qui jouit aussi d’une solide expérience internationale, verra son rêve se fracasser devant cette dernière marche. Après cet échec, l’ex-Représentant spécial adjoint du Secrétaire général de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) reprend son costume diplomatique au service de son pays. Il est resté éloigné des questions nationales ces dernières années.
Même s’il lui arrivait de donner son avis sur la marche du pays de temps à autre. Mais, il n’y avait plus de proximité avec le dernier régime. Avec l’actuel, les relations sont cordiales, comme le montre cette nomination présidentielle. Né en 1947, le professeur Bathily est historien et universitaire. Militant communiste dans sa jeunesse, Bathily fut député et ministre sous Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, et plusieurs fois candidat à la Présidentielle. Réputé pour sa franchise et son intransigeance sur les principes démocratiques, comment va-t-il gérer ces putschistes ?
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