M23 en RDC: «La complexité de la situation n’aide pas à mettre ce conflit en lumière»

M23 en RDC: «La complexité de la situation n’aide pas à mettre ce conflit en lumière»

Lauréat du prix Visa d’Or humanitaire du CICR au festival Visa pour l’image de Perpignan, le photojournaliste britannique Hugh Kinsella Cunningham a passé les deux dernières années à documenter le conflit en cours dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Pour RFI, il raconte cette guerre complexe qui a contraint plus d’un million de personnes à fuir les combats.

Vous venez de recevoir le Visa d’Or humanitaire du CICR pour votre exposition « Déplacés par le M23 » qui met en lumière le sort des réfugiés obligés de fuir le conflit en cours au Nord-Kivu en République démocratique du Congo (RDC). Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Hugh Kinsella Cunningham : C’est une magnifique récompense de savoir que des organisations humanitaires comme la Croix-Rouge s’intéressent à mon travail et qu’elles estiment qu’il est utile de le mettre en lumière. J’ai passé beaucoup de temps à suivre des travailleurs humanitaires dans différents contextes au Congo, et j’ai vraiment un immense respect pour le travail qu’ils font dans ces zones. J’ai couvert l’épidémie d’ebola au Congo, j’ai toujours été épaté par les docteurs et les infirmières qui travaillent dans ces conditions. Ils font partie des personnes les plus courageuses que vous pouvez rencontrer dans ces situations. C’est donc réellement une grande fierté que de recevoir ce prix.

Vous couvrez le conflit qui oppose les rebelles du M23 à l’armée congolaise au Nord-Kivu depuis plusieurs années. Est-ce que vous pouvez nous expliquer cette guerre, ainsi que le but de votre travail ?

Pour faire simple, ces deux dernières années, l’ampleur du conflit a pris une nouvelle envergure. Les rebelles du M23 sont d’anciens mutins de l’armée congolaise. Ils sont aujourd’hui armés et supportés par le Rwanda, qui a également déployé des milliers de soldats de son armée régulière à sa frontière avec la RDC.

Mon travail retrace les deux dernières années de l’offensive rebelle du M23. Au début, cela a commencé doucement. Ils ont attaqué des petits villages, et des positions de l’armée congolaise ont été débordées. Petit à petit, l’offensive du M23 s’est étendue et les rebelles ont occupé une grande partie du Nord-Kivu, forçant au passage plus d’un million de civils à fuir leur maison.

Votre travail se concentre tout particulièrement sur le sort des civils ?

Oui, la plupart des civils doivent fuir pour sauver leur vie. Très souvent, les attaques ont lieu vers 4 ou 5 heures du matin. Les familles sont réveillées par des coups de feu et des explosions à proximité de leur village et elle doivent fuir en emportant le peu qu’elles ont avec elles.

J’essaie également de montrer ce qui attend ces civils après ces moments de terreur et de trauma lorsqu’ils arrivent dans des camps de déplacés, qui sont des endroits terribles. Pour ces civils, c’est comme être au purgatoire. Ils pensent avoir atteint un endroit sûr, mais en fait, leurs problèmes ne font que commencer, car ces camps font face à de nombreuses épidémies, et ils sont très dangereux, en particulier pour les femmes. Il y a un nombre inimaginable de viols et de violences sexuelles.

Selon vous, pourquoi cette guerre particulièrement meurtrière n’attire-t-elle pas plus l’attention des médias internationaux ?

C’est difficile à dire, mais je pense que d’une certaine manière, la complexité de la situation n’aide pas à mettre ce conflit en lumière. C’est une histoire incroyablement compliquée, car vous ne pouvez pas parler des conflits au Congo sans parler de décennies de prolifération de groupes armés et de forces rebelles.

Les civils n’ont aucun contrôle sur leur destin, ils sont ballotés par les vagues successives des différents conflits. Une famille de déplacés fuyant la guerre n’aura certainement jamais la chance d’écrire sa propre histoire, de construire sa vie, tout cela par ce qu’elle est bloquée dans ce conflit.

RFI

Petit Ba

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