Mali: une semaine après les attaques jihadistes à Bamako, les interpellations se poursuivent et inquiètent

Mali: une semaine après les attaques jihadistes à Bamako, les interpellations se poursuivent et inquiètent

Au Mali, le colonel Assimi Goïta s’est « incliné » devant la « mémoire des innocents » tués par les jihadistes du Jnim, lié à al-Qaïda, mardi 17 septembre à Bamako. Le président malien de transition s’est exprimé dans la soirée du samedi 21 septembre à l’occasion de la fête de l’indépendance du pays.

C’était sa première prise de parole depuis la double attaque de Bamako, mardi 17 septembre, pour laquelle le colonel Assimi Goïta n’a toujours pas donné de bilan officiel mais qui a fait, selon de nombreuses sources sécuritaires et civiles maliennes, plus de 70 morts et 200 blessés. Celui-ci y a assuré les Maliens de la « poursuite » des « opérations de stabilisation » et du « redéploiement » de l’armée dans le pays.

Les interpellations de personnes soupçonnées de complicité dans les attaques de Bamako sont nombreuses et se poursuivent, elles aussi. Et si elles n’ont fait l’objet d’aucune communication officielle à ce stade, beaucoup d’inquiétudes sont exprimées, notamment dans les rangs de certaines communautés qui se disent victimes de stigmatisation.

Les derniers échanges de tirs n’étaient pas terminés à l’aéroport de la capitale malienne, mardi 17 septembre à la mi-journée, que la télévision d’État ORTM filmait déjà une vingtaine de suspects, interpellés aux abords de l’école de gendarmerie. Ce sont ces deux lieux qui avaient été attaqués dès l’aube, il y a tout juste une semaine. Depuis, les arrestations n’ont pas cessé. Combien y en-a-t-il eu au total ? Pour quels faits ? Ces arrestations ont-elles déjà donné lieu à des inculpations ? Des personnes ont-elles été relâchées ? Sollicités par RFI, ni l’armée malienne, ni le ministère de la Sécurité et de la Protection civile n’ont donné suite.

« Présumés auteurs, co-auteurs et complices »
Une enquête a officiellement été ouverte le jour même de la double attaque par le pôle judiciaire spécialisé antiterroriste, notamment dans le but « d’identifier et d’interpeller les présumés auteurs, co-auteurs et complices pour qu’ils répondent de leurs actes devant la Justice », selon le communiqué du procureur.

Dans la loi malienne, la période de garde-à-vue est de 72 heures, mais, pour les affaires de terrorisme, elle peut atteindre quinze jours renouvelables deux fois, soit 45 jours au total.

De source sécuritaire malienne, les arrestations sont extrêmement nombreuses à Bamako, à Kati (une ville-garnison collée à la capitale qui est aussi le fief des militaires au pouvoir), mais aussi en région, notamment dans celle de Ségou. Les personnes interpellées sont détenues à Bamako par les services de la Sécurité d’État ou de la gendarmerie.

Le chef d’état-major général des armées, le général Oumar Diarra, demandait dès mardi 17 septembre à la population de collaborer et de « fournir des informations » pour appréhender d’éventuels « complices ». Il appelait également à éviter les « amalgames » pour éviter toute forme de représailles communautaires.

Mais les vidéos violentes circulant sur les réseaux sociaux et les confidences recueillies hors micro par RFI ne rassurent pas. Elles témoignent de nombreuses arrestations effectuées sur la base de dénonciations populaires. Des dénonciations qui ciblent très largement la communauté peule, mais qui n’épargnent pas les « teints clairs », Touaregs et Arabes. « Certains sont livrés directement par des habitants aux forces de sécurité », témoigne un cadre communautaire, qui se déclare « choqué ». Un autre citoyen appartenant à l’ethnie peule explique que les remarques assimilant sa communauté aux « terroristes » fusent de plus en plus ouvertement dans son entourage, même en sa présence, et qu’il a même été personnellement pris à partie au cours des derniers jours pour avoir évoqué, lors d’une discussion, des vidéos circulant sur les réseaux sociaux.

Appels à la retenue
Beaucoup ne cachent pas leurs craintes que la situation ne dégénère. Certains encouragent même leurs proches à éviter les sorties inutiles. D’autres, qui soutiennent les autorités de transition, rappellent également pouvoir sortir dans la rue sans être inquiétés.

De nombreuses personnalités, organisations et leaders communautaires, partis politiques ou même des artistes ont lancé ces derniers jours des appels à la retenue, à la cohésion et au vivre-ensemble.

PRESSAFRIK

Petit Ba

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