Mozambique: journée calme malgré les appels à la manifestation de l’opposant Venancio Mondlane
Au Mozambique, c’est une journée calme malgré les appels à manifester de l’opposant Venancio Mondlane. Le candidat à la présidentielle a demandé trois jours supplémentaires de mobilisation, à partir de ce mercredi, contre les fraudes électorales. Ce mouvement de protestation dure depuis près de 15 jours et sa répression a déjà fait plus d’une trentaine de morts. Ce matin, beaucoup de boutiques sont restées fermées dans le centre de Maputo, mais dans les quartiers périphériques, la vie suit son cours.
À Maputo, sur l’avenue des Accords de Lusaka, Nelson, 23 ans attend son xiapa, un minibus pour aller travailler. Ce n’est pas l’envie de manifester qui lui manque, mais plutôt les moyens. « Aujourd’hui, certains peuvent se permettre d’aller manifester, mais nous qui sommes là, avons besoin de gagner notre pain pour nourrir notre famille. Je ne suis pas fatigué des manifestations. Une autre fois, je les rejoindrai peut-être, ça dépend », constate-t-il.
L’appareil sécuritaire déployé ce mercredi matin a de quoi décourager. D’autant qu’hier, le commandant de la police, le général Bernardino Rafael, a prévenu : les forces de l’ordre sont prêtes à affronter ce qu’il a qualifié de « terrorisme urbain ». « Il ne s’agit pas de manifestations pacifiques, mais de manifestations violentes, à tendance subversive dont l’intention est de porter atteinte à l’ordre constitutionnel mozambicain. Les manifestations ça suffit. On retourne au travail », a-t-il déclaré.
Depuis sa cachette, Venancio Mondlane continue de mobiliser ses troupes sur Facebook. Ce matin encore, il postait une vidéo : « On ne reculera pas, malgré les paroles de délire profond, de désespoir même, du commandant général Bernardino Rafael. Si la police veut utiliser la violence, nous rappelons que le peuple a le droit de légitime défense. » D’après le bureau du procureur général, plus de 200 procédures pénales ont été ouvertes, dans le cadre des manifestations.
Des boutiques fermées dans le centre de Maputo
Ce matin, beaucoup de boutiques sont effectivement restées fermées dans le centre de Maputo. Sur l’avenue Karl Marx, il n’y a pas âme qui vive. Olga Raimundo y vend des sodas. Elle gagne environ 200 meticais par jour, moins de 3 euros. Mais aujourd’hui encore, elle devait fermer boutique.
« J’ai peur qu’il m’arrive quelque chose. J’ai des enfants, et si on me tire dessus ? Les manifestations nous coûtent, à nous qui vendons dans la rue. Mais ça peut aussi être une bonne chose. Les prix de la nourriture a augmenté, on ne peut pas envoyer nos enfants à l’université. Les choses basiques coûtent cher », confie-t-elle.
Julietta Domingos, vend des tickets de loterie. Depuis le début de la contestation, elle a perdu près de 2000 meticais, 30 euros, soit près du tiers de son loyer, ce qui n’empêche pas son engagement dans la contestation. « Ça fait presque 15 jours que je ne travaille pas. Moi, je ne gagne de l’argent que si je sors. Ils disent qu’il faut des sacrifices pour que les choses aillent mieux. Alors, nous devons manifester. Moi, je crois qu’il va y avoir du changement », constate-t-elle.
Le nez sous un capot, Moises, 20 ans, répare des voitures. Son garage, c’est la rue Agostinho Neto. Il n’a pas les moyens d’avoir un local et ne trouve pas d’emploi. « En vérité, j’ai déjà perdu beaucoup d’argent, mais je soutiens le mouvement. Ça en vaut la peine, parce que ça fait 50 ans que l’on souffre, nous raconte-t-il. On est fatigués de vivre depuis 49 ans avec un seul parti, qui ne fait rien. On ne vit pas, on survit. »
D’après le Centre pour l’intégrité publique, une organisation de la société civile, la contestation électorale a déjà coûté au Mozambique près de 360 millions d’euros.
RFI