OFNAC – Traitement diligent des rapports : Bass change de voie
Serigne Bassirou Guèye, après avoir été récepteur, est le nouvel émetteur de rapports de l’Ofnac. Ancien procureur de la République, l’actuel président de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption a transmis 9 rapports au chef du Parquet de Dakar après la publication du rapport d’activités 2022. Va-t-il aller plus loin que M. Guèye qui n’avait posé aucun acte connu dans le traitement de la vingtaine de dossiers que sa devancière lui avait transmis pendant ses longues années à la tête du ministère public ?
Par Bocar SAKHO – Le rapport d’activités 2022 de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) est riche en informations : 9 rapports d’enquêtes ont été transmis aux autorités judiciaires chargées des poursuites en 2022. Il concerne «l’affaire relative à l’acquisition et à la prestation de services de transport de vivres et autres produits dans la lutte contre les effets de la pandémie du Covid-19 ; l’affaire de détournement de deniers publics, de faux et usage de faux, d’occupation de terrain sans droit ni titre, de comptable de fait et de faute de gestion contre le sieur Mamadou Sow, maire de la commune de Gandé ; l’affaire de faux et usage de faux en document administratif contre Assane Samba et le Bureau des Domaines de Ngor/Almadies», entre autres. Si Serigne Bassirou Guèye n’a pas tenu de conférence de presse pour expliquer le contenu de ce document de 92 pages, un concentré de révélations sur de supposées fautes de gestion des deniers publics, cela lui a permis d’éviter de s’embarrasser de certaines questions sur le traitement judiciaire de ces dossiers à lui transmis. Alors qu’il fut le procureur de la République jusqu’au 22 novembre 2021. Soit 8 ans.
Quelles suites seront données à ces rapports par le procureur de la République Abdou Karim Diop ? En tout cas, les rapports 2015, 2016, 2017, 2018, 2019 et 2020 ont été déposés sur la table de Serigne Bassirou Guèye en tant que patron du ministère public. En décembre 2020, Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté, présidente de l’Ofnac, révélait qu’une vingtaine de rapports lui avaient été transmis. Elle avait ensuite dégagé toute responsabilité dans la gestion judiciaire de ces dossiers : «Les rapports d’enquêtes de l’Ofnac sont remis directement au procureur de la République. On a déposé plus d’une vingtaine de rapports d’enquêtes sur la table du procureur de la République. Ce qu’il faudra noter dans le texte -c’est un argument de texte que j’invoque-, le dépôt du rapport auprès du procureur de la République dessaisit l’Ofnac. Une fois le procureur saisi, nous sommes dessaisis.» Quelques mois plus tard, notamment lors de sa passation avec Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté le 21 décembre 2022, Serigne Bassirou Guèye tentait de balayer les interrogations : «Concernant les rapports de l’Ofnac qui ont été transmis au Parquet quand j’étais procureur de la République, ils ont été tous traités. Et vous savez que le processus de traitement obéit à des étapes. Sachez que les dossiers de l’Ofnac ne sont pas lettres mortes.» Sans donner plus de précisions qui auraient aidé à balayer les doutes sur le traitement de ces dossiers judiciaires.
«Nous mettons également en exergue les leçons apprises et les recommandations pour l’avenir»
Aujourd’hui, les rôles sont totalement inversés, avec Serigne Bassirou Guèye qui se retrouve dans le rôle «d’émetteur» de rapports au successeur de son successeur au niveau du Parquet de Dakar. Officiellement, aucun dossier n’a connu une suite judiciaire publique en dépit des soupçons de corruption et de fraude qui pesaient sur certaines personnalités politiques. Sans doute, cela a poussé l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption à noter les recommandations du rapport d’activités 2022, le gouvernement à examiner la possibilité d’ériger la corruption en crime international au même titre que le noyau dur des crimes internationaux classiques (crime de guerre, crime d’agression, crime contre l’humanité et génocide), à allonger la prescription en la matière à une durée de 7 ans pour lutter contre l’impunité, entre autres.
Dans son mot de bienvenue, Serigne Bassirou Guèye lui-même écrit dans le document publié ce jeudi : «En cette période cruciale où la lutte contre la corruption est plus que jamais nécessaire, notre institution -votre institution- ne pouvait manquer de redoubler d’efforts pour faire face aux défis et réaliser des avancées significatives dans la prévention et la répression de la fraude et de la corruption.
Ce rapport donc reflète l’engagement de notre pays à promouvoir l’intégrité, la transparence et la bonne gouvernance. Il met en lumière les défis rencontrés et les opportunités saisies. Il permet d’analyser les tendances de la corruption au niveau national, ainsi que les facteurs socio-économiques et politiques qui influencent le paysage de la corruption au Sénégal. (…) Nous mettons également en exergue les leçons apprises et les recommandations pour l’avenir, afin de continuer à améliorer notre efficacité et notre impact dans la lutte contre la fraude et la corruption. En définitive, ce rapport d’activités annuel témoigne de l’engagement inébranlable de l’Ofnac à promouvoir l’intégrité et la transparence au Sénégal.»
bsakho@lequotidien.sn