VA-T-ON VERS UNE HAUSSE ÉVIDENTE DES Prix DES DENRÉES DE Premières NÉCESSITÉS ? Un ajustement structurel en gestation
Lors d’une conférence de presse tenue hier, le premier ministre Ousmane Sonko a exposé la situation économique et financière actuelle du pays tout en s’efforçant de justifier les crises en cours, notamment les inondations et la recrudescence des départs de jeunes vers l’immigration. cette intervention a également été marquée par des accusations directes contre l’ancien ministre des Finances, moustapha Ba, et ses prédécesseurs amadou Ba et Abdoulaye Daouda Diallo, accusés d’avoir falsifié les chiffres relatifs à la gestion des finances publiques. Cependant, ces déclarations peuvent laisser de nombreux séné- galais sceptiques en raison des contradictions évidentes dans le discours du « Pastéfien » en chef, notamment avec le maintien en poste des plus proches collaborateurs de l’ex-ministre des finances.
Moustapha Ba est accusé d’avoir manipulé les chiffres, mais ses collaborateurs les plus proches, tels que l’ancien directeur de la programmation budgétaire, aujourd’hui promu ministre des Finances et du Budget, ainsi que Maguette Niang, le directeur du budget, le directeur général du Trésor et le directeur des impôts et domaines, sont toujours en poste. Comment peut-on alors accuser un seul homme tout en maintenant en fonction ceux qui, sous sa direction, auraient contribué à cette supposée manipulation ? En promouvant certains des collaborateurs de l’ex-ministre des Finances à des postes stratégiques, le Premier ministre semble protéger un « système » dont il dénonce pourtant les dérives, tout en essayant de défendre son actuel ministre des Finances. Par ailleurs, il convient de noter que le ministre de l’Économie actuel, Abdouramane Sarr, qui a fait l’état des finances, a pris le relais de sa sœur, Oulimata Sarr, qui a communiqué avec les bailleurs pendant un an. De même, le Secrétaire général du ministère de l’Économie a été le directeur général de la planification. Cette situation devrait disculper le ministre des Finances sur les déclarations faites lors de cette conférence. De plus, l’absence du ministre Cheikh Diba à cette conférence soulève également des questions, lui qui serait pourtant le mieux placé pour répondre à certaines accusations visant son ancien patron et mentor. Cette incohérence alimente les spéculations selon lesquelles le Premier ministre cherche surtout à neutraliser politique- ment des figures influentes comme Amadou Ba et Abdoulaye Diallo en voulant sacrifier Moustapha Ba comme bouc émissaire. En le ciblant, Ousmane Sonko tente-t-il de détourner l’attention des problèmes économiques actuels et de préparer l’opinion à la hausse prochaine des prix du carburant et de l’électricité sous la pression du FMI ?
On s’achemine directement vers un ajustement structurel et une cure d’austérité. Sans risque d’être démenti, que les Sénégalais se préparent à des lendemains difficiles économiquement et socialement. Ces augmentations, qui risquent d’être impopulaires et dictées par le FMI, peuvent en partie être justifiées par les accusations portées contre l’ancien ministre des finances, Moustapha Ba, dans le but de rendre le régime précédent responsable de la situation actuelle et des hausses à venir. À la décharge de Moustapha Ba et de l’ancien régime, les subventions, aussi élevées qu’elles aient pu être sur la période 2022 et 2023, ont été motivées par une volonté affirmée de soulager les ménages. C’est également ce que l’on at- tend du nouveau régime, qui semble toutefois impuissant face à l’injonction du FMI de supprimer les subventions.
comment la Banque mondiale, le Fmi et les autres institutions financières communautaires et internationales ont-elles pu être dupées par moustapha Ba ?
Par ailleurs, une question cruciale se pose, comment la Banque mondiale, le FMI et les autres institutions financières communautaires et internationales ont-elles pu être dupées par Moustapha Ba ? Ces organisations, réputées pour leurs mécanismes de contrôle rigoureux, continuent pourtant d’accorder leur confiance au Sénégal. Si Moustapha Ba avait réellement manipulé les chiffres, cela aurait dû ébranler la crédibilité du pays sur les marchés financiers. Pourtant, les nouvelles autorités continuent de jouir d’une solide réputation sur ces mêmes marchés, ce qui suggère que les accusations portées contre Moustapha Ba sont peut-être infondées ou exagérées. Le point de presse du Premier ministre laisse donc entrevoir une volonté de se dédouaner face à plusieurs crises du moment, notamment les récentes inondations qui risquent de provoquer la colère de la population, les vagues d’immigration et la hausse du coût de la vie malgré les baisses de prix annoncées, signes d’un profond malaise social. En concentrant les critiques sur les anciens ministres des Finances, Ousmane Sonko semble vouloir se défaire de la responsabilité actuelle de son gouvernement dans la gestion des urgences du moment.
L’accusation contre Moustapha Ba semble mal fondée. Il paraît difficile de croire qu’un seul ministre ait pu tromper des institutions financières de renommée mondiale sans que ses proches collaborateurs, toujours en fonction, n’en aient été complices. Les déclarations du Premier ministre méritent une réponse de la part des ex-ministres des Finances, mais au-delà, une déclaration des institutions comme la Banque mondiale et le FMI est également attendue, car elles risquent d’être accusées de complicité dans cette situation.
A.F