Primes de performances des athlètes : il est temps de réviser l’arrêté Youssoupha Ndiaye…
Le cri de cœur de Louis François Mendy a eu une onde de choc dans le landerneau sportif sénégalais. Pourtant tout a été fait dans les règles de l’art en respect de la règlementation en vigueur. Sauf qu’il faut reconnaitre qu’un athlète de sa trempe mérite un meilleur traitement. D’où l’urgence de réviser l’arrêté Youssoupha Ndiaye de 2005 pour une meilleure gestion des athlètes de haut niveau.
«Être champion d’Afrique pour gagner une prime (sic) de 50.000 FCFA de la part du ministère des Sports. Une autre somme de 30.000 FCFA rajoutée à cette dernière par le président de la Fédération. Mieux vaut aller jouer au football car Sadio Mané ou Gana n’aurait jamais accepté cette somme. Je vous remets votre prime. Fier d’être Champion d’Afrique. Il est tant que cela cesse».
Cette sortie au vitriol de Louis François Mendy, sacré champion d’Afrique à Douala au Cameroun a eu une onde de choc.
Pourtant, c’est le règlement en vigueur au Sénégal qui lui a été appliqué dans toute sa rigueur, sur la base de l’arrêté de Youssoupha Ndiaye du 25 février 2005 portant sur «classification des disciplines sportives et récompenses aux sportifs» et qui fixe les barèmes de quatre primes auxquelles, les athlètes sénégalais ont droit. Il s’agit des primes de qualification, de préparation, de participation et de performance. Cette dernière s’élève dans le cas d’espèce à 700.000 F CFA.
Une dernière prime dite exceptionnelle est prévue selon le bon vouloir du président de la République, compte tenu de la performance. Abdou Diouf avait déjà déclaré : «Kou Def Lou Rey, am lou rey» en s’adressant aux Lions de basketball qui avaient remporté le titre continental en 1997 au stadium Marius Ndiaye, devant l’ogre du Nigeria.
Après le sacre des Lions le 6 février 2022 au stade Olembe du Cameroun, le Président de la République avait offert à chaque membre de la délégation officielle deux terrains (200 mètres carrés à cote de l’aéroport Senghor et 500 mètres carrés au niveau de la nouvelle ville de Diamniadio) en plus d’une rondelette somme de 50 millions.
Après l’élimination des Lions en 8èmes de finale de la coupe du monde au Qatar, le Président Sall avait aussi usé de son pouvoir discrétionnaire pour octroyer 20 millions de primes aux membres de la délégation officielle.
Pour revenir au cas Louis François Mendy, il faut noter qu’en plus des primes susmentionnées, l’arrêté Youssoupha Ndiaye prévoit aussi des indemnités journalières qui s’élèvent à 3000 F CFA/J au Sénégal et de 5000 F CFA/J au niveau international plus une indemnité de participation journalière fixée à 10.000 F CFA. C’est sur cette dernière que la coqueluche de l’athlétisme sénégalais a craché.
Et nous estimons que son cri de cœur devrait être entendu et compris par les nouvelles autorités qui prônent le Jul, Jubal et Jubanti.
Pour y arriver, il n’y a pas 36 solutions : il faut tout simplement réviser l’arrêté de Feu le ministre d’État, ministre des Sports, Youssoupha Ndiaye. Si cet arrêté avait le mérite de régler beaucoup de choses, parce qu’il faut le souligner aucune fédération, aucun athlète ne pouvait se prévaloir du paiement de prime(s) de médailles obtenues avant la survenue de l’arrêté susmentionné. C’est le premier document administratif encadrant l’octroi de récompenses ou de primes aux athlètes et aux équipes nationales.
Toutefois, il faut reconnaitre qu’il est complètement obsolète et ne répond plus aux aspirations des athlètes de niveau haut.
Un haut responsable du département des Sports avait d’ailleurs suggéré, l’intégration de technique, administratif et médical ; des nouvelles compétitions dans la classification ; des nouvelles disciplines dans la classification mais aussi l’actualisation du barème des primes selon le niveau et l’importance de la compétition. Sa requête dort encore dans les tiroirs.
L’athlétisme n’est certes pas le football. Mais en tant que première discipline olympique, il mérite plus d’égards de la part des autorités.
D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que dans la classification des disciplines sportives et récompenses aux sportifs méritants, Feu Youssoupha Ndiaye avait mis les Jeux olympiques en pole position, suivis des championnats du monde seniors. Les jeux africains, de la Francophonie et les championnats d’Afrique des nations seniors sont loges dans la classe C. Les jeux sous régionaux, (CEDEAO…), les championnats d’Afrique des nations jeunes et les Championnats Ouest-africains seniors (Cabral) ferment la marche.
Mieux, dans le classement des disciplines sportives, le Football, l’athlétisme, le Basketball et le karaté occupent le groupe I. Dans le groupe II, on retrouve le judo, le tennis, la boxe, le handball, le cyclisme, la natation, la lutte, la pêche sportive, le taekwondo et le jeu de dames. Toutes les autres disciplines sont logées dans le groupe III.
CLONER LES FEDERATIONS DE FOOTBALL, DE BASKETBALL ET DE HANDBALL
Le principal problème du sport sénégalais semble être la gestion des disciplines individuelles. Paradoxalement ce sont elles qui ont valu à notre pays le plus de satisfaction.
La dernière belle surprise, ce sont les performances réalisées par Louis François Mendy (110 mètres haies), Saly Sarr (triple saut) et Cheikh Tidiane Diouf (400 mètres). Une telle moisson remonte en 2012.
Pourtant, ils n’auront droit qu’à 700.000 F CFA chacun selon toujours l’arrêté de Youssoupha Ndiaye. Pendant ce temps, chaque joueur de l’équipe nationale de football du Sénégal a touché 1.000.000 F CFA comme de primes de sélection pour les matches contre la RD Congo et la Mauritanie. Mieux, chaque Lion a touché 1.000.000 pour le match nul contre la RD Congo et 2.000.000 pour la victoire devant la Mauritanie.
Personne ne prône l’égalité entre le football qui a une dimension sociétale sans commune mesure avec les autres disciplines. Toutefois, le curseur devrait être mis sur l’équité sportive.
Nos Lionceaux U-17 qui sont montés sur la plus haute marche du podium en Algérie ont été reçus en grande pompe par le Chef de l’État, Macky Sall qui leur a octroyé une prime exceptionnelle de 5 millions chacun. Les U-20 ont eu le double de ce moment pour la même performance. Alors que l’État doit encore à certains athlètes des sports individuels, pour la plupart, médaillés en 2022 et en 2023, des primes non payées.
Toutefois, il faut quand même saluer le fait que les primes des grands événements sportifs internationaux (GESI) soient prises en compte en amont, intégrées lors de l’élaboration des fiches techniques et payées dès le retour de compétition sanctionnée par une performance.
Elles sont d’emblée programmées dans le budget; conformément aux arrêtés fixant les primes des joueurs ou athlètes et des membres de l’encadrement technique et administratif des équipes nationales.
Une nouvelle dynamique qui s’approche de celle des Fédérations de football, de basketball et de handball qui anticipent sur les primes et autres indemnités en commun accord avec l’État. Des exemples à suivre !
Abdoulaye THIAM